En attendant la navette... si navette il y a [PV Ianto]

8h30 du matin.
Cardiff ; petite rue tranquille.

Pantalon noir, bonnes chaussures, chemise blanche ouverte dévoilant un torse bien dessiné et deux colliers, Lysandre avançait au gré des rues en essayant de faire des réglages sur son rizzer, un appareil de son monde qui ressemblait de loin à une montre. Lorsqu’on regardait de plus près, on voyait qu’il y avait plus d’aiguilles, sur plusieurs cadrans - comme certaines montres pour homme - mais aussi une sorte de lentille et d’autres cadrans avec des graduations qui n’étaient pas celles de la Terre ! Enfin, il fallait regarder d’assez près quand même. A première vue, c’était une simple montre si on n’y faisait pas attention...

Lysandre tournait doucement la molette du remontoir, dans un sens, dans l’autre, il arrêtait, reprenait... Quelque chose était bizarre, les aiguilles s’affolaient. Elles n’avaient jamais fait ça avant ! Sauf la fois où il s’était retrouvé dans une tempête magnétique, mais c’était différent. Là, il n’était pas dans un petit vaisseau.

D’ailleurs, des vaisseaux, il n’en avait pas encore vu sur cette planète. Pourtant, qu’est-ce qu’il avait pu voir ici ! Il avait vécu quelques étranges évènements, depuis son arrivée mais beaucoup de zones restaient floues. Et la décharge électrique qu’il s’était pris dans la main la veille ne l’avait pas aidé à garder les idées claires. Il se souvenait de nuages rouges, d’un type en armure, d’une boite bleue, d’un docteur qui semblait bien connu des gens avec qui Lysandre avait échangé quelques mots, d’un tas de gens qui criaient, d’un fantôme...

Enfin, pour le moment, il avait des problèmes plus sérieux. Il continuait d’avancer en faisant des réglages quand les aiguilles se stabilisèrent. Il avait trouvé le problème et l’avait réglé. Cette planète n’avait pas la même atmosphère que Téhébos, et cela avait faussé certaines données. Maintenant, c’était rétabli. Lysandre pouvait donc se concentrer sur son problème principal : où pouvait se trouver la station d’amarrage des navettes ?


8h45 du matin.
Cardiff ; place Roald Dahl.

Au-dessus de Torchwood, sans le savoir, Lysandre soupira de soulagement en arrivant sur cette large place. Voila ! La station d’amarrage devait être ici ! Il y avait assez de place, entre ces colonnes, pour permettra à une navette-soucoupe de se poser et de décoller sans heurts. Aussi Lysandre décida d’attendre un peu. Il attendit quelques minutes, fit le tour de la place, attendit encore devant un haut bâtiment...

Soudain, il vit quelqu’un s’adosser à un mur afin d’allumer une sorte de petit tube blanc qu’il tenait entre ses lèvres. Etrange coutume, Lysandre se renseignerait plus tard sur sa signification. Il pointa son rizzer sur l’individu et une image holographique de l’homme qui venait d’allumer sa cigarette apparu au-dessus de la montre de l’alien, sortant de celle-ci. Puis l’image rentra dans la lentille, enregistrée dans la base de données. L’homme ne le regarda même pas, trop occupé à fumer en fixant ses pieds. Il attendait sans doute quelqu’un. Lysandre attendit encore quelques minutes puis s’approcha de l’individu.

*Excusez-moi...* lui dit-il par télépathie.

Vieille habitude. Il faudrait vraiment qu’il la perde. Déjà l’homme s’en allait en courant. Il ne devait vraiment pas être habitué à la télépathie. Quel monde primitif... Le Téhébossien soupira puis s’adossa à son tour au mur. Les minutes passèrent lentement.

Il était 9h quand une jeune femme arriva au-devant de Lysandre et le dévisagea. Sans doute voulait-elle rejoindre l’homme qui avait fuit... L’alien lui adressa un sourire gêné qu’elle ignora royalement avant d’aller s’adosser au mur un peu plus loin. Elle regarda sa montre puis autour d’elle. Elle attendit encore un instant puis sortit elle aussi un petit tube blanc qu’elle alluma à l’aide d’un briquet. Cette coutume était décidément très répandue. C’était l’occasion de se renseigner. De toute façon, Lysandre avait l’intention d’attendre une navette ici, alors autant que son attente soit utile...

« Excusez-moi... » dit-il en s’inclinant légèrement, les femmes étant supérieures aux hommes sur sa planète. « Pourriez-vous me dire ce que vous êtes en train de faire... ? »
La jeune femme le dévisagea et répondit sur un ton cinglant : « J’attends, ça ne se voit pas, pauv’type. »

Le Téhébossien haussa un sourcil. Pauvre ? Non il était noble... enfin, avant de se retrouver dans le futur, puis sur une planète inconnue, à une époque tout aussi inconnue. Aussi performant qu’il soit son traducteur universel avait un peu de mal avec les insultes...

« Pardonnez mon insistance, noble dame, je vous questionnais à propos de ce tube blanchâtre que vous semblez affectionner... »

La Terrienne le regarda comme s’il était fou et s’éloigna sans le quitter des yeux, tout en sortant son téléphone portable de son sac. Un drôle d’appareil aux yeux de Lysandre, qui ne savait pas ce que c’était. Le Téhébossien s’adossa à nouveau au mur, en silence. Il n’avait plus qu’à attendre encore. Il ne savait pas combien de temps, mais il n’avait pas vraiment d’autres choses à faire...

Quelqu’un s’approcha finalement de lui. Un homme sans doute autochtone ou du moins qui semblait bien connaitre cette planète.
Lysandre le regarda calmement, se demandant tout de même s’il allait se faire réprimander pour avoir abîmé du matériel avec son rizzer. Même si ce n’était pas un gros trou, il avait quand même dégradé un bâtiment. Un bâtiment dont il ne connaissait pas l’utilité mais bon...

L’inconnu lui demanda seulement d’où venait « cet objet alien » qu’il avait utilisé pour faire apparaitre un hologramme.
L’alien le regarda comme s’il était fou, comme s’il venait de demander quelque chose d’absurde. Lysandre cligna des eux, vraiment surpris de la façon dont il avait été abordé. Il ne s’attendait vraiment pas à cette question !

« Euh... »

Ce fut la seule réponse qu’il donna avant que l’autre décide finalement de se présenter. Il se présenta ainsi donnant son nom, puis son prénom et son nom - sans doute une coutume locale - et donna sa fonction. Il était agent de police.
Ah... sans doute l’avait-il abordé sur un terrain neutre - quelque chose d’aussi banal qu’un rizzer - avant d’en arriver à la punition pour les dégâts - certes mineurs - qu’il avait fait par inadvertance...

« Oh... Monsieur Jones... en fait, je cherchais une navette pour rentrer chez moi... Je m’appelle Lysandre Xénophon... désolé pour le laser, je ne l’ai pas fait exprès. »

Il s’inclina légèrement, même si ce n’était pas dans ses habitudes.
Il sourit légèrement, mal à l’aise, en se passant la main sur l’arrière de la tête. Puis, se rappelant la première question de Ianto Jones, lui dit calmement :

« Quant à cet objet, il vient de l’atelier de Rayy. »

Machinalement, il ne précisa pas que cela venait d’une autre planète. Pour lui, les voyages intersidéraux étaient chose commune ! Et le fait que son rizzer ait été modifié dans l’atelier de Rayy était plus important à ses yeux que le fait qu’il vienne d’une autre planète...

Lysandre ne put se retenir de soupirer de désespoir quand il eut la révélation qu’il craignait le plus : la seule navette était un bateau-bus pour rejoindre Jersey. Il ferma un instant les yeux, découragé. Pourquoi devait-il endurer ça ? Et surtout comment allait-il rentrer chez lui ? Dire qu’il était abattu moralement était un euphémisme et, à la déprime, se mêlait un étonnement sans nom, une salve de question qui le harcelaient : pourquoi ces informations contradictoires ? Pourquoi... ?

C’est alors que l’autochtone lui demanda d’où il venait. C’était si évident que cela qu’il n’était pas d’ici ?! Il sourit légèrement, un peu triste, et répondit :

« Non, en effet, je ne suis pas d’ici... Je viens... » il rit légèrement « En fait, c’est compliqué... juste avant d’arriver ici, j’étais sur Minos, que j’explorais en compagnie du professeur Sûh et de Rigel... »

Il s’interrompit, se disant que le reste était quand même assez compliqué et étrange. Et surtout, sans doute peu crédible ! Comment, sur une planète qui n’avait pas de navette pour atteindre l’espace, arriverait-il à faire croire qu’il venait d’une autre galaxie, d’une planète inconnue, qui se trouvait 1000 ans dans le futur de son époque... et qu’il ne savait même pas dans quelle époque il était là, ni comment il était arrivé...

Il soupira légèrement et après quelques instants de silence, l’homme enchaina sur une nouvelle question, lui demandant où se situait l’atelier de Rayy.... Bon, eh bien finalement, il allait devoir parler de ce petit voyage dans le temps.

« Il se situe... sur Téhébos, mais... 1000 ans dans le passé par rapport à mon exploration de Minos... Une erreur de calcul m’a envoyé dans le futur lorsque je bricolais avec Rayy... »

Il avait dit ça comme si c’était tout à fait naturel. Après tout, ce n’était rien de spécial. Ce qu’il ignorait c’était qu’il avait effectué non pas un mais deux voyages dans le temps : le premier pour aller dans le futur sur Téhébos... et le second depuis Minos jusqu’à la Terre. Car à l’époque actuelle, 4 500 ans avant l’ère de sa naissance, Téhébos n’était qu’une petite planète tout juste habitée par des êtres unicellulaires...

« Et pour compliquer les choses, je ne sais pas vraiment où nous sommes par rapport à Téhébos... Je pense qu’un portail dimensionnel a été ouvert sur Minos... et quand j’ai rouvert les yeux j’étais ici et désarmé »

Oui, désarmé, malgré la présence de son rizzer au poignet...

Le regard de Lysandre s’illumina quand Ianto lui expliqua qu’il pouvait localiser Téhébos. C’était merveilleux ! Ce monde n’était pas aussi primitif qu’il en avait l’air ! Un sourire ravi aux lèvres, l’alien emboîta le pas de l’agent de Torchwood jusqu’à sa base. Avec un froncement de sourcils sceptique, il accepta de rester immobile à l’emplacement que lui indiqua Ianto et un large sourire s’afficha sur son visage quand il remarqua qu’il était dans un genre d’ascenseur. C’était amusant ! Fascinant ! Il faudrait qu’il l’étudie, à l’occasion... Dans cette base, il y aurait même sûrement beaucoup de choses à étudier !

Il regarda la base en question rapidement avant de reposer son attention sur l’humain qui en présentait le personnel : un docteur, une informaticienne, un ancien agent de police, leur chef et lui qui venait d’une autre base Torchwood. Restait encore à savoir exactement ce qu’était une informaticienne, en quoi se résumait le travail d’un agent de police sur cette planète, et ce qu’était Torchwood exactement. Il savait juste que c’était une organisation experte en aliens, mais experte dans quel sens ? Dissections primitives ? Etudes ? Aide ? Rien n’était dit là-dessus. Enfin, l’alien était armé et l’humain ne semblait pas menaçant, alors ça allait.

Regardant partout autour de lui comme un enfant dans un magasin de jouets, Lysandre suivit Ianto. Presque tout ici lui semblait étranger, de diverse manière que ce soit : certains accessoires étaient intéressants par leur côté ancien et leur apparence rétro, tandis que d’autres brillaient d’ingéniosité, et d’autres encore attiraient l’attention de Lysandre qui en ignoraient totalement leur fonction. Il regarda l’humain mettre en route la machine à café, sans savoir ce que c’était, et regarda un instant le liquide noirâtre... étrange. Probablement un système de générateur... restait à savoir vraiment à quoi ça servait.

Lorsque le logiciel ‘‘Researcher of planet’’ eut fini son travail et que Ianto expliqua à Lysandre l’état de sa planète, le Téhébossien soupira longuement.

« Encore un voyage temporel... » se plaignit-il d’un air las, sans pour autant sembler inquiet ou surpris de ce voyage spatial, comme si c’était quelque chose de tout à fait ordinaire pour lui. « Ca explique pourquoi mon rizzer ne s’est pas mis à jour... »

Il commençait à en avoir marre ; d’autant plus que celui-ci était tombé à un mauvais moment. Il aimait bien la vie qu’il menait avant ce voyage temporel, et il était sur le point de faire une importante découverte avec le professeur Suh et Rigel ! Mais bon... les voyages sont toujours formateurs, et celui-ci le serait également. Il avait sans doute beaucoup à apprendre sur cette planète ! Maintenant qu’il avait vu de quoi ce Terrien était capable, il commençait à se demander, au fond, si cette planète était aussi primitive qu’elle en avait l’air... mais d’un autre côté, nombre de points assez conséquents allaient dans le sens d’un monde qui n’était pas très développé...

« Ah, je sens que l’adaptation ne sera pas si aisée... »

Il soupira légèrement, résigné. Si seulement il existait des bouquins sur le savoir vivre sur Terre à cette époque, ça serait tellement plus simple !

Lysandre regarda le café avec un haussement de sourcil. Ce jus noir était donc une boisson qui donnait de l’énergie ? Etrange... ça n’avait pas l’air très bon. A l’odeur, ça devait même être plutôt amer, mais bon. Tous les goûts sont dans la nature... et puisqu’il devait s’adapter aux goûts de ce monde, gouter à cette boisson terrienne était sans aucun doute une étape facile à franchir. Il accepta donc la proposition avec un léger sourire.

Sa tasse à la main, il écouta Ianto lui raconter l’histoire de Torchwood. Connaitre la date de la fondation de cette organisation et le nom de la reine qui en était à l’origine ne l’aidait pas beaucoup dans un premier temps, mais toute information était toujours utile à enregistrer pour la suite. C’est pourquoi, machinalement, dès que Ianto commença ce récit, Lysandre effleura l’écran de son rizzer qui fit une légère lueur bleue claire avant de redevenir inerte. Cela lui permettait d’enregistrer les informations données par l’agent de Torchwood. Il pourrait ensuite les reclasser et interroger qui de droit sur les éléments qu’il ne connaissait pas ou ne comprenait pas bien ! Mais en tout cas, de ce récit, il avait bien compris une chose : ne pas s’approcher de qui que ce soit de l’organisation UNIT ! Restait à savoir comment identifier ces personnes... et s’il pouvait réellement faire confiance à Torchwood.

Ah ce que ça s’annonçait difficile ! Mais par chance, Lysandre trouvait en Ianto un soutien inespéré. A défaut de le renvoyer tout de suite chez lui, il allait l’aider à s’adapter à cette terre qui serait pour lui une étape provisoire, où il resterait une durée indéterminée, avant de rentrer chez lui.

« Merci beaucoup. C’est très généreux de votre part. »

Ayant l’autorisation de se promener dans la base, il saisit aussitôt l’occasion pour en apprendre davantage sur cette technologie inconnue. Certains éléments semblaient monstrueusement archaïques mais avaient sans doute paradoxalement un énorme potentiel. Lysandre savait qu’il ne fallait pas se fier aux apparences. Avant de juger cette technologie, il allait l’étudier ! Et étudier, il adorait ! Tandis que Ianto appelait l’agence immobilière, Lysandre s’approcha des ordinateurs, intrigué par ces appareils. Tout en observant un écran éteint, il dit :

« Vous savez, au fond, je n’ai pas vraiment besoin d’un logement... je pourrais rester ici, il y a bien assez de place, ne vous dérangez pas pour moi. »

Il effleura l’écran de l’ordinateur et attendit un instant. Aucune réaction de l’appareil. Sans doute ne fonctionnait-il pas comme ça. Tant pis, appareil suivant ! Toujours aucune réaction.

« Et puis, le temps d’étudier tout ça, vous savez... »

Pensif, il était déjà parti dans ses analyses et ses réflexions.